Et si dehors, c’était dedans… Et si dedans, c’était dehors…
Mais alors, où est la frontière ?
Allongé dans une chaise longue sur la terrasse des Trels, je me pose cette question, tout en rêvassant. Une réponse, mais pas celle que j’attends, me vient à l’esprit : ‘’Il ne faut vraiment avoir rien d’autre à faire, pour se poser ce genre de question’’. Effectivement, je n’ai rien d’autre à faire, alors j’en profite, à l’heure de la sieste, pour me laisser aller à explorer et essayer de trouver la limite du dedans et du dehors.
A la construction de la maison des Trels, la haut sur la colline qui domine mon village natal, j’ai souhaité qu’une très grande baie vitrée relie notre salle de séjour à la terrasse et offre à notre champ de vision le petit bois et la vallée de la Dordogne. Le but étant d’agrandir notre dedans, non pas matériellement, mais visuellement, de façon à avoir l’impression de vivre davantage dehors, tout en étant dedans et de profiter au maximum de la vue que nous avons de la nature qui nous entoure. Aujourd’hui , même si en hiver, des vitres nous séparent de l’extérieur, le résultat est là.
Inversement, quand nous sommes installés sur la terrasse, avec les trois coulissants rabattus, nous pouvons très facilement participer à une conversation avec les gens qui sont dedans. Dehors est alors presque dedans.
En juillet 2004, nous étions les premiers habitants des Trels. Seules les bornes posées par les géomètres, marquaient les limites de notre terrain. Inconsciemment, sans doute, nous ne faisions pas la différence entre chez nous et chez les voisins. Pas besoin de nous clôturer, puisque nous étions tout seul ! Et pourtant, le temps est venu où, il a fallu le faire…
Les Trels où jadis, seules les vignes poussaient, ont vus sortir du sol de nouvelles constructions. A quelques centaines de mètres de la maison, dans un lotissement communal, deux premières constructions sont devenues habitables. Je n’aurais pas aimé y habiter, de peur, d’être un peu trop les uns, chez les autres…D’autres parcelles diffuses ont également accueilli des maisons neuves.
On a donc décidé de bâtir un mur, un vrai en pierre, avec un vrai portail. Avant que ce mur n’existe, quand je sortais de la maison, je disais que j’allais dehors. Maintenant depuis que ce mur sépare la propriété de la route, quand je suis dans la cour, devant la porte, je dis que je suis dedans. Enfin dans la propriété. Et j’ai l’impression de n’être dehors qu’après avoir poussé le portail…
Toujours allongé dans ma chaise longue, je suis entrain de me demander si l’espace ne peut pas avoir une conception évolutive. Nos coulissants en sont peut être une ébauche ? Pourquoi ne pas imaginer que l’on puisse pousser les murs, les cloisons, les portes, les fenêtres ? Ainsi, on démobiliserait l’espace, invitant le dedans et le dehors à se confondre. Tout en étant dedans on pourrait aussi être dehors. Et vice-versa !
Autour de nous, à Toulouse, mais on peut aussi le vérifier un peu partout ailleurs, on a tendance à édifier des grilles et des murs de clôture, de plus en plus hauts, souvent agrémentés de panneaux dissuasifs du type : ‘’Défense d’entrée’’, ‘’chiens méchants’’ et les portails sont fréquemment pourvus de digicodes et d’installations vidéo. Le but est évident : L’habitant veut ainsi marquer et montrer les limites de sa propriété et de son intimité. Dans d’autres civilisations, même si l’on ne laisse pas forcément pénétrer plus facilement les étrangers chez soi, la limite dedans, dehors, n’est pas matérialisée aussi fortement. Les Japonais, par exemple, jouent beaucoup avec des sortes de cloisons mobiles, pour remplacer portes, fenêtres et cloisons intérieures. L’espace devenant ainsi plus facilement modulable et transformable. La limite dedans, dehors, n’est pas figée. C’est peut-être cette conception évolutive de l’espace qui a amené dans l’architecture d’entreprise les Open space du XXIème siècle. Ces grands espaces de travail, où directeurs et employés ont leurs bureaux côte à côte, sans cloison ni claustra. Dans ce cas précis, en faisant tomber les frontières physiques qui existaient par l’intermédiaire des cloisons des bureaux, on peut se demander, si on ne rentre pas dans l’individu. Son dehors s’agrandit, au détriment de son dedans. Attention danger !
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